Colloque international
Tourisme ET communautés :
confrontations d’expériences sur les types de liens

Présentation

Depuis le milieu des années quatre-vingt dix, la relation entre le tourisme et les communautés - locales ou ethniques, selon les latitudes et les cultures – s’est installée au centre des préoccupations (Girard & Schéou, 2010). Les injonctions de développement durable et la remise en cause des standards du tourisme de masse donnent du crédit à une mise en valeur des singularités susceptibles de mettre en scène « l’authenticité » des sociétés qui composent la planète. À côté de l’écotourisme, le tourisme communautaire est à la mode. S’il part du principe, selon les instances internationales du tourisme, de la participation des communautés concernées, sa mise en place reste très hétérogène, à cause d’une part, de la simplification extrême des deux concepts auxquels il est associé – communauté et participation - et d’autre part du contexte spécifique de chaque pays concerné. Ajoutons à cela l’extrême diversité des approches scientifiques en fonction des spécificités culturelles que véhiculent les chercheurs mais aussi des objectifs qu’ils se fixent (recherche fondamentale et recherche appliquée).

Le schéma idéal suppose l’existence, à l’échelle locale, d’une communauté organisée, décidée à « s’exposer », à montrer ses pratiques du quotidien et formée pour cela. Un premier questionnement concerne la définition même du terme de communauté : de quoi parle-t-on ? Fait-on référence à une minorité ethnique, facilement identifiable par la langue, les vêtements, le type d’habitat, les modes de vie, les traditions et les activités sur un territoire bien défini ? Ou bien, s’agit-il des habitants d’un village en milieu rural, s’adonnant par exemple à la pêche ou à la riziculture, sans que rien toutefois ne puisse les différencier des autres villages de l’ensemble de la région ?

Le deuxième questionnement concerne la participation : cette dernière doit en principe permettre d’éviter que les projets touristiques résultent d’accords entre investisseurs étrangers et gouvernements nationaux, sans que les populations soient consultées ou participent à leur élaboration (Girard & Schéou, 2010). Elle doit encourager les bénéficiaires attendus à se prendre en main en mobilisant leurs propres ressources. Mais la participation est différente d’un exemple à l’autre, selon les ressources humaines de la communauté locale et le mode national de gouvernance.  La communauté est-elle associée aux décisions prises concernant le choix des activités touristiques proposées ? Sa participation se limite-t-elle aux seules études préalables, destinées essentiellement à collecter des données ? S’étend-elle jusqu’à la mise en œuvre et la gestion des activités touristiques ? Concerne-t-elle la conception et la gestion opérationnelle de l’ensemble du projet ? De même, dans quelle mesure la communauté bénéficie-t-elle des effets induits de l’activité touristique (emplois, approvisionnement alimentaire, artisanat, etc.) et comment s’effectue la redistribution des bénéfices ? Pour aller plus loin, quelles qu’en soient les modalités, la mise en tourisme des communautés participe-t-elle de leur pérennité ?

Au final, tourisme communautaire, ethnique, équitable, etc., derrière ces expressions se cachent nombres de réalités très différentes selon les contextes. De la même façon, entre une survivance de traditions en voies de disparition et l’invention de traditions pour une mise en folklore, entre la prise en main de l’économie touristique par la communauté elle-même et l’organisation publique ou privée d’une mise en scène de ces communautés, les « réalités » sont multiples et les conséquences pour les communautés très diverses.

L’ambition du colloque consiste à comprendre l’intérêt et l’efficacité, pour les communautés bénéficiant d’une mise en valeur touristique, des différentes formes que peuvent revêtir ces types de tourismes. Les communications attendues devront s’attacher particulièrement à la relation entre tourisme ET communautés, en dégageant des indicateurs pertinents susceptibles de montrer la capacité d’une mise en scène touristique à remplir les conditions d’une durabilité économique, sociale et culturelle. Elles pourront également se préoccuper, en les questionnant, des limites de certains modèles. La réflexion doit ouvrir le champ des possibles de manière à déboucher sur une publication qui, certes, s’appuiera sur des études de cas mais dépassera la simple présentation des contextes pour dégager des indicateurs transversaux pertinents, économiques, sociaux et culturels.

 

Quelques exemples :

  • niveau d’association et de participation selon les différentes étapes de la mise en tourisme ;
  • évolution des modes de vie, des comportements, des codes culturels de la communauté locale ;
  • nombre d’emplois créés, directs et induits, pour la communauté ;
  • typologie de ces emplois (cadre/emploi peu qualifié,  définitif/temporaire, masculin/féminin) ;
  • niveau et mode de redistribution des bénéfices ;
  • nombre de membre de la communauté ayant bénéficié d’une formation ; - spéculation foncière ;
  • pression touristique (rapport en effectifs communauté locale / touristes) ;
  • avis de la communauté sur la mise en tourisme ;
  • etc.

Les clés d’entrées sont donc nombreuses, de l’efficacité économique des modèles à la capacité de résilience des communautés à l’ouverture induite par le tourisme, en passant par le degré d’implication des membres de la communauté concernée et les types de gouvernance. Certes, l’hypothèse qui sous-tend ce questionnement n’est pas nouvelle. Elle renvoie à la difficulté pour une communauté à perdurer dans la confrontation à l’altérité et face à l’augmentation de son niveau de vie. Dans une perspective de durabilité, notre quête pourrait se résumer à deux questions : dans quelles conditions la mise en tourisme de ces communautés peut-elle favoriser à la fois leur développement économique voire leur survie, et leur permanence culturelle ? Quels sont les indicateurs les plus pertinents pour  la recherche, qui permettent de forger les outils pour mieux comprendre les enjeux de la relation entre les communautés locales ET le tourisme ?

Quelques références bibliographiques

  • Beeton, S. (2006). Community Development through TourismVictoria, Landlinks Press.
  • Girard, A. & Schéou, B. (2009). Le tourisme solidaire communautaire à l’épreuve des illusions culturaliste et participative, l’exemple d'une expérience au Bénin, Colloque « Tourisme et objectifs du millénaire pour le développement », Sousse, Tunisie.
  • Girard, A. & Schéou, B. (2010). Tourisme et communautés rurales : une relation délicate, intervention orale au colloque de Ben Tre, Vietnam.
  • Häusler, N. & Stasdas, W. (2003). Training Manual for Community-based Tourism. Zschortau, InWent.
  • Johnston, A. M. (2006). Is the Sacred fo Sale ? Tourism and Indigenous Peoples. Londres, Earthscan.
  • Lequin, M. (2001). Écotourisme et gouvernance participative. Sainte-Foy, Presses de l’Université du Québec.

 

16-Mai-2011  — Directeur de la publication : jean-yves.puyo@univ-pau.fr
Conception/Réalisation nicole.lompre@univ-pau.fr

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